vendredi 30 septembre 2011

Investigations sur les abus


Investigations sur les abus

Qui a refusé de bombarder Kasserine ?
Le mystère des snipers continue

Après la révolution du 14 janvier, une commission d’investigation a été constituée pour déterminer la responsabilité des abus commis lors de ces événements. Six mois après sa constitution, le président de cette commission Me Taoufik Bouderbala, dresse le bilan de l’activité de sa commission.

• Le Temps : Après plus de 6 mois d’investigation, la commission a-t-elle accompli une grande partie de sa mission ?

- Me Taoufik Bouderbala : Une fois constituée et après la parution du décret présidentel la concernant le 2 mars 2011, la commission a aussitôt commencé son action. Ses membres ont effectué des visites dans les gouvernorats pour recueillir la version des familles des martyrs celles des témoins et aussi celles des blessés.

 Nous avons commencé par Sidi Bouzid et Kasserine, et avons rendu visite à toutes les familles concernées et nous avons constitué des dossiers individuels pour chaque cas. Les enregistrements ont été réalisés avec des moyens numériques et de supports papiers. Ces visites ont commencé le 10 mars et se sont terminées le 8 juillet. Elles ont été effectuées dans les 24 gouvernorats du pays. Plus précisément, nous avons effectué 65 visites et parcouru 110 mille kms.

• Quels sont les résultats ?

-On s’est rendu compte que Ben Ali avait donné l’ordre de bombarder Kasserine pour faire cesser les manifestations. Il y a eu une enquête judiciaire qui a établi que cet ordre a été effectivement donné. Mais, il n’a pas été exécuté et c’est à l’honneur de celui qui ne l’a pas exécuté.

• Qui ?

-On ne le sait pas. Peut-être au niveau régional parce qu’un bombardement peut se faire par des avions, mais aussi par des blindés.

• Revenons aux résultats 

- Nous avons constitué 2118 dossiers dont 244 concernant les décès, 1489 les blessés et 385 les dommages causés, aux biens publics et privés. Je crois que nous allons atteindre les 300 décès parce qu’il y a des cas graves parmi les blessés.
Il y a aussi les décès dans les prisons enregistrés au cours des opérations d’évasion. Mais au niveau des responsabilités le dossier concernant les prisons diffère des dossiers des martyrs et des blessés. Nous avons aussi enquêté sur le nombre des victimes dans les rangs des forces de l’ordre et les circonstances de leur mort parce que nous ne faisons pas de différence entre les victimes.

• Et celui des « snipers » ?

- Nous avons été les premiers à essayer de clarifier ce problème. Mais cette question n’est pas encore résolue. Nos investigations ont démontré qu’il n’y a pas de corps constitué de snipers au sein des structures du ministère de l’Intérieur.
Mais, des opérations des snipers ont bien eu lieu par des personnes ayant agi sur ordre ou sans ordre.
Après ces investigations nous avons commencé, juin dernier, à auditionner des grands responsables du ministère de l’Intérieur. Il y a en a 15 qui sont en état d’arrestation dont deux sont en liberté provisoire. Nous allons continuer d’auditionner aussi les responsables qui ne sont pas impliqués ainsi que des anciens ministres. A la fin de ces investigations, nous établirons un rapport sur l’historique de ces événements pour cerner les responsabilités qui sont essentiellement de responsabilité institutionnelles,car les responsabilités individuelles relèvent de la compétence des tribunaux. Ce rapport déterminera le nombre des décès et des blessés et comportera des recommandations pour dédommager les victimes.

Interview réalisée par Néjib SASSI

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