Raouf KHALSI-
L’information laisse pantois : Mustapha Ben Jaafar serait cautionné par
des chancelleries étrangères et béni – dit-on – par les dignitaires
d’Ennahdha, pour assumer la présidence de la République durant la
période de la Constituante. Il est vrai que le leader d’Ettakatol a fait
une prestation digne d’un vrai militant
et digne d’un Chef d’Etat, à la télévision. Et plus précisément il a
révélé une dimension politique le prédestinant plutôt à Carthage qu’à la
Kasbah : c’est l’homme politique par excellence. Ce n’est pas un
technocrate trop collé aux chiffres et aux courbes, espèces de repères
pour ceux qui, politiquement, n’en ont pas assez.
Mustapha
Ben Jaâfar, l’un des rares opposants à n’avoir jamais prêté l’oreille
aux appels de l’étranger du temps de Ben Ali, est d’une probité et d’une
honnêteté telles qu’il se fâcherait sérieusement s’il apprenait qu’on cherche à lui coudre un costard à sa mesure et – plus grave encore - qu’Ennahdha
bien en phase avec nos amis français – dit-on encore – lui proposerait
son appui pour mieux l’aliéner. Ben Jaâfar n’est pas homme à se laisser confondre dans les brumes de ce type de compromissions.
Il
est tout à fait normal qu’en cette ère d’éclosion des idées, de
renaissance politique et de foisonnement d’une culture plurielle – signe
distinctif de la Tunisie carthaginoise, berbère, arabe, musulmane,
européenne – il est normal, donc que les enjeux paraissent assez flous
aux yeux des puissances occidentales. Un bras de fer vicieux et secret
se déploie, par exemple, entre la France et l’Amérique : c’est à qui
mieux mieux pour le statut de garant, sinon de gardien de la future
démocratie tunisienne. Et pourtant c’est fini ! La Tunisie s’est
rébellée. Ses futurs dirigeants seront élus le 23 octobre. Et ses
futures institutions seront authentiques et non pas calquées sur
d’autres modèles.
Plus
de tutelle alors. Et si les Nahdhaouis ressentent toujours le besoin
d’avoir une charpente comme refuge – quel que soit son drapeau – cela
révèle une contradiction de base glorifier notre identité
arabo-musulmane, en faire une fixation même et, en même temps, flirter
avec des « démocraties » occidentales. A l’évidence Kissinger a des
émules au sein d’Ennahdha même.
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